Le viol de Marie-France O'Connor - Claude MARCEAU

Le titre est un peu choquant, je vous l'accorde. C'est l'histoire qui est choquante. Non pas pour le plaisir de l'être, mais tout simplement parce que c'est le départ d'un livre qui décrit les répercussions d'u viol en question sur la femme qui en est victime autant que sur tous ceux qui, quelque part, sont responsables de la petite mort d'e cette jeune femme.
Claude Marceau ne détaille pas la scène, c'est inutile. Juste un flash, un tournant en forme de tête-à-queue, dans la vie de la jeune fille, Marie-France O'Connor, et dans celle de l'accusé, Cyrille Mahikan, qui l'est, accusé et condamné, avant tout parce qu'il est Indien.
Ce livre, c'est 37 ans de silence peuplés par les confidences des acteurs du viol, ceux qui, peu ou prou, savent et se taisent et celles de Marie-France dont l'esprit à jamais égaré cherche à trouver un chemin perdu un soir d'hiver, quand un homme l'a violée et a tué son père qui l'avait surpris. Chacun, tour à tour, va dire sa vie, va parler du drame, va broder sa vérité, va tenter de continuer avec celle-ci.
Deux personnages m'ont particulièrement touchée : Marie-France O'Connor, bien sûr, qui passe en quelques minutes de l'insouciance, de la certitude confortable de son exceptionnelle beauté, de sa séduisante féminité et de son pouvoir de séduction à l'enfer d'un crime à son encontre et la destruction totale de sa vie et de son devenir. Et puis, il y a Cyrille, cet Indien dit coupable qui va tenter d'échapper à la justice et à ce policier qui le traque des années. On va le suivre, Cyrille Mahikan, dans ces plaines du grand nord où plus rien ne pousse, ou presque, où le vent, la neige, le froid et quelques animaux farouches sont les seuls habitants de ces terres sauvages et vierges.
Les personnages, surtout ces deux-là, sont touchants de vérité. Claude Marceau, natif lui-même de Forestville, sur la Cöte-Nord, sait bien décrire ces contrées faites de solitude et de silence, propres à la méditation, discipline qu'il aime à pratiquer. Ses marches en forêt et au bord de la mer où il affectionne l'observation et l'étude des plantes sauvages et des oiseaux servent largement quelques-uns de ses propos quand il suit l'Indien dans sa folle quête d'un semblant de vie au milieu de ces terres du bout du monde. Ces quelques pages qui rendent à l'Indien ses terres ancestrales sont les plus belles !
L'écriture est jolie, légère, juste, facile, jamais lassante. J'ai retrouvé, au travers de ces pages, un peu de la plume de Louis Hémon et quelques effluves du personnage de Maria Chapdelaine. Les moments de vie dans les rafales et les hivers glacials nous y ramènent immanquablement et la même magie s'opère...
Publié en 1995 chez XYZ éditeur et disponible seulement au Québec... Dommage !
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